Où comment trouver un livre parmis des milliers d'autres.

Ageha glissa sur un missel et tomba violement sur les fesses. Endolorie, elle se releva en maugréant, et regarda autour d'elle. Des livres, des livres, à perte de vue. Mais pas signe de celui qu'elle cherchait... Et pas un panneau indiquant la sortie. Elle soupira: comment en était-elle arrivé là?

Tout avait commencé ce matin. Ageha lisait tranquillement "Manon Lescault", allongée sur son lit, la B.O. d'Amélie Poulain dans les oreilles, quand elle en avait soudain eu marre du libertinage de Manon. La jeune fille avait balancé le bouquin à travers la pièce, et s'était penchée pour tirer sa valise de son lit, dans l'espoir d'y trouver le volume relié des "Romances sans paroles" de Verlaine. Après quelques minutes de recherches infructueuses, elle dût bien se rendre à l'évidence: elle l'avait oublié "chez elle"... Elle l'avait perdu tout court, donc. Très énervée par cette perte, la lycéenne avait résolue d'aller faire un tour dans l'île bibliothèque.

Elle n'en était pas à sa première visite. Au début de sa vie à Mahora, elle y avait même passé quelques nuits, trouvant du réconfort dans la proximité de tout ces vieux livres. Mais en trouver un en particulier... C'était une autre histoire. Cela faisait trois heures qu'elle errait dans les rayonnages déserts, à la recherche du petit livre. Elle avait finit par trouver la section poésie, mais de Verlaine... Pas de trace.

Franchement découragée, elle sentit les larmes lui monter au yeux. Furieuse contre elle-même, elle s'intima l'ordre de se calmer, et récita dans sa barbe:

"Le ciel est, par-dessus les toits

Si bleu si calme

Un palmier par-dessus les toits

Berce sa palme

Une cloche dans le ciel qu'on voit

Doucement tinte

Un oiseau par-dessus les toits

Chante sa plainte..."

Elle en était à ce stade de la poésie et se sentait tout à fait sereine, quand son regard tomba sur une livre très mince, dont la couverture était ornée d'un tableau de van Gogh. Ravie, elle poussa un petit cri et se précipita dessus. Ne restait plus qu'à trouver la bibliothcaire... Et la sortie.

Je passais ma main sur les tranches poussiéreuses d'énormes grimoires, pensant que ce contact familier me rassurerait. Sans espoir, je ne ressantais nul réconfort. Jamais je ne ressentais quoi que ce soit d'ailleurs, d'habitude. Car aujourd'hui, je pouvais sentir l'angoisse m'envahir, vague déferlante qui me détruisais de l'intérieur. Je n'avais aucun souvenir de la semaine qui venait de s'écouler, ma mémoire était entièrement vierge sur cette période. J'étais venu trouver une réponse dans les livres, ici, sur l'île bibliothèque, mais après de nombreuses heures de recherches, je n'avais trouvé aucune trace d'un sortilège capable d'effacer les souvenirs d'une si longue période.
Le contrôle de mes jambes m'echappai soudain, et je m'écroulai, tentant à peine de me retenir aux étagères. Que m'arrivais-t-il ? Mais que m'arrivais-t-il ? J'avais tellement envie de me réfugier quelque part où il y aurais une personne pour m'attendre... Doux rêve. J'avais depuis longtemps choisit la solitude, l'exil. Moi qui ne possédait pas de sentiments, je ne méritais pas que l'on s'intéresse à mon existence.
Ma vue se troubla une seconde, sous la pression du doute et de la peur qui me tordait les entrailles. On me volait ma vie. L'éternel manipulateur que j'étais devenais la marionnette d'une ombre toute-puissante que je ne pouvais discerner. Je n'avait même plus de volonté. Me relever était au-dessus de mes forces. J'étais terrifié, j'étais faible, et je détestais ça.

Dans mon gouffre obscur, quelques vers vinrent me trouver, quelques paroles vinrent sonner à mes oreilles.

Une fille venait de passer à côté de moi, sans me remarquer. Ses paroles avaient suffit à me sortir du noir, m'avaient purgé de tout sentiments. Je me relevai et demandai d'un ton froid :

- Je peux vous aider ? Vous êtes perdue peut-être ? C'est vrai que cette bibliothèque est grande...

Je m'approchai d'elle, et passai derrière elle.

-When I walk alone without you
I wish you were by my side

J'avais laissé les mots s'échapper, se poser sur mes lèvres pour que je les susurre. Je souris de mon air le plus charmeur possible.

- Ce n'est pas de la poésie, juste un chanson qui me trottait dans la tête.

- Je peux vous aider ? Vous êtes perdue peut-être ? C'est vrai que cette bibliothèque est grande...

Ageha sursauta et se retourna, sur le qui-vive. Des années de vagabondage lui avaient appris à se méfier de tout, et ce n'était pas une voix, aussi polie et agréable qu'elle fut, qui allait faire exeption à la règle. Son regard tomba sur une paire d'yeux d'un bleu éblouissant, avant de dézoomer pour voire un garçon de treize ans, ou peut-être quatorze? possédant de longs cheveux rouges et noirs. *c'est une manie, les couleurs bizarres, dans cette école!* Entre le rouge de Miu, le bleu de Max, le blanc de Chitose et Liu, sans parler d'Akiro et de ses cheveux violets.... Le gamin (pour elle s'en était un) lui passa dans le dos.

-When I walk alone without you
I wish you were by my side

Furieuse, l'adolescente se retourna à nouveau pour se retrouver face à face avec l'étrange garçon. Elle détestait que l'on se tienne dans son dos. Cela mettait ses nerfs à rude épreuve.

- Ce n'est pas de la poésie, juste une chanson qui me trottait dans la tête.

-Jolie paroles, monsieur l'inconnu. Même si elles énoncent une évidence, mais les chansons sont faites pour ça. En effet, je suis perdue. Déjà que j'ai mis trois heures à trouver ça elle leva le recueil de poèmes je ne vois pas trop comment je vais faire. Si tu pouvais me montrer la sortie, ça m'arrangerait. Tu aimes la poésie?

- Jolies paroles, monsieur l'inconnu. Même si elles énoncent une évidence, mais les chansons sont faites pour ça. En effet, je suis perdue. Déjà que j'ai mis trois heures à trouver ça, je ne vois pas trop comment je vais faire. Si tu pouvais me montrer la sortie, ça m'arrangerait. Tu aimes la poésie ?

Je réprimai un léger rire. Comment je faisais pour toujours tomber sur des filles dans ce genre ? Heureusement, celle-là ne pouvait pas être aussi... spéciale que l'autre, m'amuser avec elle serait sans doute facile. Divertissant. Mais pour un temps. Jamais mes jouets ne duraient longtemps, je me lassais vite.

- Pas tellement. Trop de codes stricts pour moi.

Je reculai de quelques pas, pour finir par m'adosser à une table. Je me mis à jouer distraitement avec la point de mes cheveux, comme si je réfléchissais. Puis je reportai mon regard sur elle pour la dévisager quelques instants, sans gène. Je la trouvai plutôt pas mal, cette fois j'allais pouvoir me délecter comme jamais...

- Et je ne t'aiderais pas, je n'en ai pas la moindre envie. C'est pas mieux de rester ici, au calme ?

Je réduis en un instant la distance qui nous séparait, assez pour qu'elle puisse sentir mon souffle dans son coup.

- Je suis si seul...

Mes doigts rejoignirent l'une de ses mains, et je l'attirai contre ma poitrine. Un grand sourire illumina mon visage, et ma voix s'empreigna de douceur lorsque je demandai, débordant d'espoir :

- Et si tu restais encore longtemps avec moi, sans avoir besoin de ressortir pour affronter le monde ? S'il te plait...

- Pas tellement. Trop de codes stricts pour moi.

Ageha n'apprecia pas la manière dont il la regarda, sans apparement se soucier de ce qu'elle pouvait penser. Le garçon mordillait la pointe de ses cheveux d'un air pensif tout en la dévorant du regard. Salaud, salaud, salaud! pensa la jeune fille. Tu pourrais au moins être discret!

- Et je ne t'aiderais pas, je n'en ai pas la moindre envie. C'est pas mieux de rester ici, au calme ?

Le coeur d'Ageha fit un bond dans sa poitrine. Le garçon venait de se dresser devant elle, menaçant, dangeureusement proche. Elle pouvait sentir son haleine sur la peau de son coup. Maintenant, les sourds battements de son coeur envoyaient du sang chargé d'hormones de peur dans toutes les veines de son corps. Hé oui, elle était terrifiée. Et totalement incapable de bouger.

- Je suis si seul...

Et elle se retrouva collée contre la poitrine du garçon, qui lui sembla tout d'un coup bien plus imposant. Elle sentait son coeur battre contre son oreille, mais elle devinait que ce n'était pas de la peur que ressentait son agresseur.

- Et si tu restais encore longtemps avec moi, sans avoir besoin de ressortir pour affronter le monde ? S'il te plait...

La décharge d'adrénaline qui s'ensuivit lui fit reprendre ses esprits. La peur la rendit agressive, et elle mordit de toute ses forces la main qui violait sa barrière physique et se jeta en arrière.

-Non mais ça va pas la tête! Bas les pattes, pervers!

-Non mais ça va pas la tête! Bas les pattes, pervers!

Une chaleure diffuse se répandait dans ma main. Elle m'avait mordu.
Des larmes me montèrent aux yeux. Qu'avais-je fais pour mériter ça ? Pourquoi me rejetait-t-on toujours ? Il n'y avait personne pour m'accepter et me croire ?

- Mais... J'ai fait quelque chose de mal ?

Je mordai ma lèvre avec une telle force qu'un goût de fer m'emplit immédiatement la bouche. Dans un geste destiné à me rassurer, je joignai mes mains et les serrai contre ma poitrine.

- Si personne ne viens vers moi et que l'on me repousse lorsque je vais vers les autres, je n'avancerais jamais...

Tout se mélangait dans ma tête, je n'avais plus les pensées claires. Je ne comprenais pas pourquoi ça se passait toujours comme ça... Un grésillement me parvint, de manière très distincte, emplissant l'air. La fille ne réagissait pas, et je vins à en déduire que j'étais le seul à l'entendre. En quelques secondes, il avait chassé tout autre chose.

- Jamais...

Je tremblais sous la force de ce bourdonnement intérieur, de peur, de colère... d'excitation peut-être.

- Jamais !

J'avais accepté de payer pour les autres trop longtemps. Trop longtemps j'avais contemplé mon ombre, sans vouloir m'élever, ne gardant pour moi que ma solitude. Rien d'autre ne m'appartenait. J'éloignais les autres. Toujours au bord du vide, à deux pas de la démence et de l'abysse.
Si lorsqu'une personne demandait de l'aide, on la repoussait avec autant de violence, c'était qu'il n'y avait plus rien à espérer.

- Kru kru kru... L'ombre... Serait-ce mon destin ?

Mes yeux me faisaient mal, tremblants de haine.

- Je n'ai nul part où trouver un semblant de réconfort...

Le monde me lâcha, et je me retrouvai écroulé contre une bibliothèque, sans force pour me relever.

Ageha se plaqua contre le mur, pétrifiée. L'étrange garçon venait de s'affaler contre une étagère, concient ou non - elle n'en savait rien. Le silence seul maintenant habitait la pièce, accompagné des sourds battements de son coeur qu'elle sentait résonner dans sa tête. Elle mit une bonne minute à retrouver son souffle. Tout s'était passé tellement rapidement, elle avait à peine eu le temps de réfléchir... Quand elle fut en mesure de commander à nouveau à ses jambes, elle fit un pas prudent vers la silhouette immobile. En voyant qu'il ne bougeait plus, Ageha fut tentée de prendre les jambes à son cou. Décidemment, il ne se passait que des choses étranges dans cette bibliothèque! Mais disparaître ne l'aurait pas avancée à grand-chose, à par la perdre un peu plus...! Et puis, elle n'allait pas laisser ce gosse tout seul, évanoui ou blessé, qu'en savait-elle? D'un autre côté, que pouvait-elle faire? Il n'y avait pas de réseau dans cet endroit pourri, inutile d'espérer appeler de l'aide.

La jeune fille se pencha sur le garçon et demanda d'une voix mal assurée:

-Hé... Ca va?

Pas de réponse. Ageha s'accroupit pour reprendre ses esprits. Le gars l'avait menacée, ou elle s'était crue menacée, et elle l'avait mordu. Visiblement, il l'avait assez mal prit... Elle ne voyait vraiment pas ce qu'il était en son pouvoir de faire. Pouvoir... Pouvoir?

Elle se releva brusquement, soudain très exitée. Elle n'avait vraiment pas une grande pratique de la magie, mais que lui coutaît d'essayer? Elle se souvenait du mot qu'avait pronnoncé Liu pour guérir ses écorchures, dans le sous-sol de la bibliothèque: "Cura". Et puis, il fallait dire avant un truc, une clé si elle se souvenait bien. Elle l'avait déjà fait dans la forêt, pour tenter de faire apparaître une flamme. La clé des débutants. Quelle était cette clé, déjà?

Panne sèche. Impossible de se souvenir. La jeune fille en aurait hurlé de rage. Bigi Nar, ok. Mais le premier mot? Elle l'avait sur le bout de la langue, mais il refusait de venir. Quelle frustration! Tant pis, elle allait devoir s'en passer. Chaque magicien était sencé avoir une clé, après tout.

Ageha se remémora le peu de latin qu'elle connaissait. La plupart des mots de sa connaissance venaient de chants religieux. Agnus Dei. Kyrie Eleison. Eterneam. Felis. Pater. Pas vraiment de quoi se faire une jolie phrase spirituelle. L'exercice l'amusait néanmoins, et elle passa quelques minutes à passer en revue son vocabulaire. Elle allait laisser tomber quand elle se souvint d'une pièce contemporaine qu'elle avait beaucoup appréciée. Elle était constituée de deux parties en miroir, la première portant le nom de Lux Noctis et la seconde de Dies Solis. Elle ne se souvenait pas ce que ça voulait dire, mais ces quatres mots lui avaient toujours plus. Ca valait la peine d'essayer.

Il manquait néanmoins quelque chose: le catalyseur. Elle n'avait pas de baton dans sa poche. Mais du bois ce n'était pas ce qui manquait ici... Sauf qu'Ageha ne se sentait pas l'âme de faire le sacrilège d'abimer une bibliothèque. Tant pis, elle allait faire sans. Si ça ne marchait pas, elle pourait toujours casser une chaise.

Ageha fit le vide dans son esprit pour tenter de retrouver les sensations qui avaient précédées son essais apparement couronné de succès, dans la forêt. Quand elle se sentit tout à fait sereine, détendue et concentrée, elle prononça d'une voix la plus assurée qu'elle put:

-Lux Noctis, Dies Solis. Cura!

Mine de rien, elle se sentait un peu idiote, à réciter du latin, debout dans une bibliothèque, devant un garçon affalé contre une bibliothèque.

[ça a marché? ça a marché? :D ]

- Cura !

Les yeux mi-clos, je sentis une douce chaleur m'envahir, se répendre dans ma poitrine et chasser mon amertume, tranquillement. J'étais si bien... Comme ces après-midis d'été, à l'école de magie, que je passais à l'extérieur, adossé à un arbre, un livre dans les mains. Les rayons de soleil carressaient mon visage, les cris des enfants qui jouaient me parvenaient aux oreilles... Un chat noir venait se frotter à moi en ronronnant, je riais à gorge déployée.
Une main se posait sur mon épaule, tout les jours, à la même heure. Je levais la tête et je l'apercevais. Erina.
Mais ce n'était plus ma réalité. Je n'avais vécu qu'un mois de bonheur, il y avait un an. Ce temps était passé, malgré le fait que j'aurais donné ma vie pour y retourner, rien qu'une seconde.
La sensation se dissipa, et je revins sur le sol glacial. M'aidant de la bibliothèque, je me redressai et lançai un regard froid à la jeune fille.

- Ce que tu viens de lancer n'étais pas une guérison, juste un rêve au goût amer. Ta pitié, ta compassion, je n'en veux pas.

La température ne faisait que chuter depuis que je m'étais écroulé, conséquence directe de mon stupide premier sort que j'avais foiré. Je n'avais jamais réussi à m'en débarrasser depuis. Un frisson parcourut ma peau, me faisant trembler.

Et enfoui dans ce frisson se trouvait un infime instant plaisir, plaisir que j'éprouvais devant ma douleur et celle des autres. Sans que je le saches, cette seconde de désir volé à la souffrance venait d'infléchir la courbe de mon destin, en bien ou en mal. Car ce fut ce désir sadique qui réveilla quelque chose en moi. Non, en fait, je ne dirais pas ça comme ça. Ce fut plutôt comme si quelque chose en moi venait de s'éteindre, sans laisser de trace. Ma raison, ma conscience ou mes rêves.

Le sang battant à mes tempes, j'incantai :

- Ignis Deus Nix, Gloria ! Ferro Naturam !

Toute l'humidité de la pièce se concentra dans ma main, puis gêla. Je tenai désormais une courte épée de glace, peu tranchante mais à la pointe acérée.
Alors que je faisais un pas vers la fille, je sentis le monde tourner autour de moi, et je crus que j'allais une nouvelle fois m'effondrer, pris de nausées.
Je repris mes esprits avec ma langue qui effleurait la joue de la fille, et ma lame à quelques millimètres de son cou. Loin de m'arrêter, je souris doucement m'empara de ses lèvres infèrieures avec les miennes.

Si ça, ce n'était pas une agression... Ageha ne se trouvait absolument pas dans une situation confortable, dans le sens où elle aurait donné beaucoup de choses pour se retrouver ailleurs, même à quelques mètres. N'importe où, mais pas le visage en face de celui d'un taré, une épée de glace pointée sur le visage. Vraiment, n'importe-où.

Elle avait un peu de mal à comprendre ce qui l'avait fouré dans ce pétrin. En quelques minutes, elle s'était fait aborder par un garçon bizarre, qui lui avait fait peur, s'était fait mordre, s'était évanoui, pour se relever et lui coller une épée devant le visage. Sans compter qu'il était en train de... l'embrasser? La mordre? Elle n'était pas sûre.

Après s'être un peu baladé, l'esprit d'Ageha revint sur terre. Elle était toujours au même endroit, toujours au même moment. Le garçon n'avait pas l'air d'avoir envie de bouger. Et elle, elle n'avait pas vraiment envie de savoir ce qu'il comptait lui faire. Donc c'était à elle d'agir pour infléchir sur ce qui s'annonçait. Plusieurs options s'offraient à elle, malheureusement irréalisables du fait de son peu de force physique et de son non-contrôle de la magie. Elle ne pouvait même pas parler. L'idée lui vint d'un seul coup.

Cet idiot avait fait une erreur en approchant sa bouche aussi près de la sienne. La première fois n'avait donc pas suffit? Ageha referma les dents sur lèvre supérieur de son agresseur et mordit de toutes ses forces, sans faire attention à l'arme à quelques centimètres de ses yeux. Elle ne savait pas trop ce qu'il allait se passer, mais dans ce genre de situation, être passif est la pire chose à faire.

Assez. Assez de ce monde. Juste... assez. Me tenir debout me fatiguait. Vivre me fatiguait. Me dégager me fatiguait. Mourir... Peut-être ? Peut-être pas.

* Tu vas faire quoi ? *

Arrêtez... Arrêtez de me demander des choses, de me parler. Laissez moi tranquille. Je veux mourir. A quoi ça sert de vivre, là ? Plus rien à faire. Que quelqu'un fasse taire les battements de mon coeur, je vous en prie...

* Pas maintenant, tu peux pas tout laisser tomber maintenant ! Apprendre la magie, apprendre à te battre, s'entraîner pour devenir plus puissant, ce n'était qu'une fuite pour ne pas regarder en face tes véritables pensées ? *

Il me reste des choses à faire ? Voir un peu plus loin ? Oui... peut-être...

Je repoussai la fille avec force et froideur, sans montrer la moindre gêne, ni la moindre jouissance.

- A quoi ça te sert de résister ? Si tu me cède, la douleur cèdera sa place au plaisir.
Lui tournant le dos, je ramassai un grimoire abandonné sur le sol, que j'avais rapidement parcourut avant qu'elle arrive. Mes doigts effleuraient le papier avec douceur, et ma voix s'élevait et redescendait, au rythme des différentes incantations qui franchissaient mes lèvre.

* Tu ne seras plus jamais seul... *

C'était faux. Mais j'avais besoin de m'accrocher à cette promesse qu'on me murmurait depuis des mois déjà...
L'air vibrait autour de moi, et un grand souffle de vent fit se soulever mes cheveux. C'était incroyable, j'avais vraiment l'impression d'être au centre d'une tornade de magie.
Une forme sombre se matérialisa devant moi, et soudain, tout cessa.

Elle était magnifique, vêtue d'une robe noir qui laissait ses épaules dénudées. Ses longs cheveux violet tombaient jusqu'à ses hanches, et encadraient à la perfection son visage parfait, au grands yeux roses et au lèvres délicates. Les deux cornes qui se recourbaient vers le derrière de sa tête et la lame déformée qu'elle tenait fermement ne permettait aucun doute sur ses origines.

- Que me donnes-tu en échange de ma soumission ?

Sa voix était chaude et rassurante, tout ce qu'il ma fallait...

- Ma magie, et tout ce qu'il te faut pour te nourrir, démone.

Elle se releva, me dépassa et avança vers la fille.

- Alors donne-moi un nom, maintenant.

Je n'eus aucune hésitation.

- Moi, Arren Sora, Magister, je permets à la démone Umi de s'abreuver de ma magie tant qu'elle me servira...

La démone nouvellement baptisé repassa devant moi, la jeune fille sur une épaule, cette fois.

- Que choisis-tu ? Tu ne peux plus lutter. Reste à savoir si tu m'aidera à imposer ma volonté à cette école, ou si tu refusera jusqu'au bout ?


La folie... Que me restait-il d'autre ? Ultime tentative de s'élever, flamme intense dans les derniers moment avant de s'éteindre.



[ Voilà ! Je sais pas dans quoi je suis partit, en désolé d'abuser de mes privilèges de Fonda, et ça se voit que j'ai relut les Black Butler il n'y a pas longtemps.... ]

- Que choisis-tu ? Tu ne peux plus lutter. Reste à savoir si tu m'aidera à imposer ma volonté à cette école, ou si tu refusera jusqu'au bout ?

Sans répondre, Ageha s'applatit un peu plus contre son mur, en se pinçant la cuisse dans l'espoir de se réveiller. Sans effet. Malheureusement pour elle, tout cela était la réalité. Mais, dans ce cas, qui était cette femme étrange qui avait rejoint le fou, tel qu'elle l'avait nommé dans son esprit? Arren (puisque tel était son nom) l'avait nommé Umi, et avait utilisé le mot "démone" pour la qualifier. Une démone. Rien que ça.

De plus, Arren s'était qualifié de magister. Cela lui faisait furieusement penser au mot "magicien". Force lui était de constater qu'elle en avait un en face d'elle, et visiblement pas dans les meilleures dispositions. Son esprit voleta vers la discussion qu'elle avait eu avec Liu, dans le café, dans une époque qui lui semblat être des siècles auparavant bien que cela ne remonte qu'à quelques jours. Il lui avait certifié que les magiciens utilisaient leurs pouvoirs pour et uniquement pour des taches nobles ; il lui avait dit qu'il n'y avait pas de méchants. Il n'avait absolument pas parlé non plus de démons. *Liu, si je m'en sors, je te promets que tu vas avoir de gros, gros problèmes* pensa férocement la fille terrifiée.

Retour à la réalité. Arren la regardait toujours. L'aider? Se faire massacrer? Aucune des deux options ne lui plaisaient. Restait la troisième, que le magicien n'avait pas évoqué: la poudre d'escampette.

Ageha ne sut jamais comment elle avait réussis à convaincre ses jambes de bouger. Le premier pas lui sembla impossible, tellement elle tremblait. Mais dès qu'elle fut lancée, elle se mit à courir, de toutes ses forces, le coeur battant, bien plus rapide que la semaine d'avant: là, elle savait qu'elle courait pour sa vie.

Je pensais, qu'au stade où j'en étais, rien ne pourrais me surprendre, ni me faire quitter la voie sur laquelle je m'étais engagé. Mais lorsque je vis la jeune fille détaler à tout allure sans prévenir, je reçus un choc comparable à lorsqu'elle m'avait mordus. Bien que mes lèvres ne bougeait pas, une partie de moi... riait.

* Je ne sais pas qui tu es, mais tu as le contrôle de mon corps, et je ne compte pas te laisser faire, et elle non plus ! *

* Je suis toi. Accepte ce fait. *

* Je commence à en avoir marre de tes ordres... Je te laisserais pas lui faire du mal, je te le promets ! *

La douleur devenait insoutenable, et je dus me prendre la tête à deux mains. Le visage défiguré par la haine, je laissa échappé un :

- Umi...

Immédiatemment, la démone fut à mes côtés.

- Oui, mon maître ?

* Tu ne pourra rien empêcher, je n'ai qu'à prononcer deux mots... *

Avec un sourire, je m'apprêtai à donner l'ordre à Umi :

- T...

Les mots se bloquèrent dans ma gorge, et j'eus la brutale impression de suffoquer.

* Mes promesses, je les tiens, contrairement à toi *

- Ignis Deus Nix, Gloria...

* Tu ne la touchera pas ! *

J'étendis mon bras, et concentrai toute ma magie au creux de ma main. Je n'avais qu'une cible, et il étais hors de question que je la manque.

- Sagitta Magica !

Je vis la flèche partir, fonçant vers la fille. Loin, quelque part en moi, quelqu'un cria.

Une déchirure au fond de mon coeur... Une larme qui roule et qui s'écrase sur le sol... Un hurlement silencieux vers le ciel... Tout s'enchaînait... Trop vite... Trop vite...

* Que quelqu'un me tue... Que quelqu'un arrête mon souffle... Qu'on me permette de quitter cette vie, au plus vite... Que ma tête arrête de me faire mal. Qu'on me délivre. *

Je n'en pouvais plus, la douleur était insoutenable. Je fermai les yeux, perdant de vue la flèche pendant une seconde. Second qui me fut fatale. L'autre dévia la magie, et la déferlante, contenant tout mon envie meurtière, me revint avec toute ma puissance. Elle traversa mon torse, m'envoyant contre un meuble, ce qui me sonna.

Le sang coulait, et ni mes doigts, ni mes gémissement ne pouvait le retenir.

- Umi...

Pourtant, j'étais plus calme que jamais, mon esprit était clair, dégagé comme un ciel d'été. Une beauté trop parfaite, irréelle. Toute fureur n'avait plus de raison d'être. La voix de la démone me parvins soudain, brisant mon éternité reposante :

- Oui mon maître ?

Mes lèvres se faisait sèches, ma respiration difficile.

- Accomplis... ton devoir.

Je ressentis une grande chaleur proche de ma blessure, et je me laissai à lâhcer prise.


Mon maître ordonne, j'obéit. Après l'avoir soigner, je tentai de repérer l'humaine. Elle courait toujours. Cela ne servait pourtant à rien. D'un saut, je me retrouvai si proche d'elle que je put lui murmurer à l'oreille :

- Préviens tout les magiciens que mon maître, Arren, vous attends à la place de l'Arbre Monde, demain soir. Je ne sais pas ce qu'il compte faire, mais vous avez intérêt à essayer de l'arrêter, si vous voulez continuer à vivre sans problème. Et puis, ce ne serait pas amusant si personne ne s'opposait à nous...
Je ris doucement et disparut, retourant auprès de mon maître.

- Préviens tout les magiciens que mon maître, Arren, vous attends à la place de l'Arbre Monde, demain soir. Je ne sais pas ce qu'il compte faire, mais vous avez intérêt à essayer de l'arrêter, si vous voulez continuer à vivre sans problème. Et puis, ce ne serait pas amusant si personne ne s'opposait à nous...


Ageha fit un bond en arrière, le coeur battant, avant de s'appercevoir que la chose avait disparu. Elle était à nouveau seule dans la bibliothèque qui lui paraissait maintenant bien silencieuse. Seuls résonnaient dans le silence les battements désordonnés de son coeur. Etrangement, elle sentait qu'il n'y avait plus de danger, en tout cas de danger immédiat. Maintenant, autre chose était à venir... l'Arbre Monde? Tout les magiciens? Est-ce qu'un combat se préparait? Elle avait peur, et se sentait totalement perdue, dans sa tête autant que dans les entrailles de ce lieu. Finalement, elle aurait mieux fait de rester dans sa chambre bien sagement.

Au bord de la crise de nerfs, elle s'assit contre un mur, à peine conscience qu'elle tremblait comme une feuille. Il fallait qu'elle sorte d'ici. Une fois sortie d'ici... Que pouvait-elle bien faire? Rassembler tout les magiciens? Elle n'en connaissait que deux: Liu et Max. Elle ne savait pas où était Max... Mais elle avait le numéro de Liu. Voilà, elle savait ce qu'elle devait faire.

Maintenant qu'elle avait un objectif, se relever fut moins difficile qu'elle aurait pu le croire. Ageha se mit à marcher d'un pas hésitant vers ce qu'elle espérait être la sortie.